đ° Thann-Cernay: Olivier GarrabĂ© Ă©vincĂ© de lâEpic
Ă la mi-janvier, par courrier recommandĂ©, Olivier GarrabĂ©, Ă la tĂȘte de lâEpic, apprend que son contrat de travail ne sera pas renouvelĂ©. Câest la douche froide. Ses fonctions sâarrĂȘteront le 1er juillet prochain. Lâheure est maintenant au bilan et aux explications.
Par 5 min – jeu.04 fĂ©v. 2021 – Temps de lecture :
Olivier GarrabĂ© a pris la tĂȘte de lâEpic le 2 juillet 2018. Il quittera ses fonctions en juillet prochain. Archive LâAlsace /Vincent VOEGTLIN
AprĂšs ĂȘtre arrivĂ© en pleine tempĂȘte , formĂ©e par la fusion du Relais culturel de Thann et de lâEspace GrĂŒn de Cernay en 2018, et aprĂšs deux saisons culturelles plus quâamputĂ©es par la crise sanitaire, Olivier GarrabĂ© apprend que son poste de directeur de lâEpic (Ă©tablissement public Ă caractĂšre industriel et commercial) ne sera pas reconduit et prendra fin au 1er juillet 2021. Le couperet est officiellement tombĂ© lors du dernier conseil communautaire de Thann-Cernay, jeudi dernier, le 28 janvier (lire encadrĂ©). Mais avant ce « procĂšs de Moscou » comme il le qualifie, un courrier recommandĂ© a fait lâeffet dâune bombe Ă la mi-janvier. « En dĂ©but dâannĂ©e, jâai demandĂ© un rendez-vous Ă lâĂ©quipe de la communautĂ© de communes Thann-Cernay (CCTC) pour dresser le bilan de mes presque trois ans Ă lâEpic. Sans succĂšs. La seule rĂ©ponse que jâai reçue, câest une lettre me proposant un entretien prĂ©alable au non-renouvellement de mon contrat de travail. Ce sont des mĂ©thodes nausĂ©abondes. Qui voudrait faire un bilan quand il sait quâil est condamnĂ© dâavance ? » Lâhomme a donc choisi de faire le bilan dans ces lignes. Aux yeux de tous.
Une gestion « hasardeuse » du budget Ă lâorigine de la cĂ©sure
Un audit financier, mandatĂ© par CCTC, aurait mis au jour des anomalies financiĂšres portant sur lâannĂ©e 2019 (lire encadrĂ©). « On me reproche une gestion hasardeuse du budget mais jâai fait mon travail loyalement et honnĂȘtement avec toutes les tensions, les injonctions et des demandes parfois infaisables. Aucune Ă©tude financiĂšre nâa Ă©tĂ© faite au moment de la fusion. Tout a Ă©tĂ© fait Ă lâarrache, mis Ă part le cadre juridique », insiste-t-il. Olivier GarrabĂ©, qui a pris les clĂ©s de la direction de lâEpic alors que la structure Ă©tait en pleine fusion, a construit ses programmations et dĂ©fini un cadre pour le budget sur des bases tangibles.
Une fusion « mal préparée »
Pour lui, cette fusion « faite Ă la hĂąte et mal prĂ©parĂ©e » nâa pas jouĂ© en sa faveur. « Entre la feuille de poste de directeur et ce que jâai rĂ©ussi Ă faire, il y a un gouffre, un vide abyssal. Certains objectifs sont inatteignables avec les moyens allouĂ©s. Les deux structures Ă©taient dĂ©jĂ financiĂšrement fragiles avant mon arrivĂ©e. » La reprise de lâEpic a donc Ă©tĂ© compliquĂ©e. « Jâai composĂ© avec des habitudes de fonctionnement des deux bourgs qui nâĂ©taient pas les mĂȘmes, et donc difficilement rĂ©conciliables. Les Ă©lus nâĂ©taient pas en phase sur la direction de cet Epic. De plus, les structures ont longtemps Ă©tĂ© accompagnĂ©es par des bĂ©nĂ©voles qui ont contribuĂ© Ă faire des Ă©conomies et assurĂ© leur fonctionnement. La fusion a fait perdre des bĂ©nĂ©voles. Ce modĂšle Ă©conomique sâest logiquement Ă©croulĂ©. Il a donc fallu mettre les moyens pour que les choses se fassent. »
Un défi au nom de la culture
Olivier GarrabĂ© a relevĂ© les manches pour faire exister cette nouvelle entitĂ© culturelle. Pour la saison 2018/2019, il a assumĂ© une programmation qui nâĂ©tait pas la sienne, composĂ©e de 46 spectacles quâil a dĂ©fendus. Dans la foulĂ©e, il a recrutĂ© du monde pour dĂ©velopper la communication et les relations notamment avec le monde scolaire. « Pour la crĂ©ation de ces postes, jâai redĂ©ployĂ© la masse salariale Ă somme Ă©gale. Un Epic ne fonctionne pas comme une association. Jâai dĂ» crĂ©er mon propre cahier des charges : faire vivre le projet en faisant rayonner une culture commune, sâoccuper de la fusion du cĂŽtĂ© administratif, sâoccuper de rassembler les Ă©quipes et recruter de nouvelles personnes, gĂ©rer les tiraillements politiques liĂ©s Ă la fusion, poser un cadre pour les associations du GrĂŒn et du Relais⊠Cette fusion a Ă©tĂ© lourde Ă porter. Je ne pense pas que nos Ă©lus locaux se rendent compte du travail quâil y avait. »
Le coronavirus, la goutte de trop ?
La saison 2019/2020 a Ă©tĂ© stoppĂ©e nette par la crise du Covid. Le monde du spectacle en a Ă©normĂ©ment souffert et navigue encore dans le flou. « Jâai pu montrer de beaux spectacles de septembre 2019 Ă fĂ©vrier 2020, mais aprĂšs ça, jâai fait uniquement de la gestion de crise. CâĂ©tait difficile. » Le directeur de lâEpic nâa pas pu faire mieux pour la saison suivante. En septembre, lui et son Ă©quipe ont rĂ©ussi Ă organiser la soirĂ©e de prĂ©sentation de saison. Le mois suivant, ils ont prĂ©sentĂ© le spectacle « Le garage Ă papa ». Puis, le reconfinement a Ă nouveau noyĂ© tous leurs espoirs. « En deux ans et demi, jâai fait de la gestion de crise et de la structuration. Je pars dignement, la tĂȘte haute. Jâai le sentiment dâavoir fait mon boulot. Il y a eu des pics de frĂ©quentation qui mâindique que la programmation faisait Ă©cho au territoire. » Lâhomme, bien que frustrĂ©, ne se cache pas dans un trou de souris et est fier du travail accompli. « Je nâai pas Ă rougir de lâaction que jâai posĂ©e. Je ne suis pas amer. Ă cause du Covid, je nâai pas pu mener Ă bien tous mes projets. Je ne laisse pas tomber mon Ă©quipe. Je tiens Ă lui rendre hommage. Je les remercie eux, et les bĂ©nĂ©voles, de mâavoir accompagnĂ© dans cette aventure. Ils mĂ©ritent dâĂȘtre placĂ©s sur le rang de bons professionnels. » Ce sĂ©isme dans le monde de la culture locale laisse songeuse la population et les questions vont bon train. « Est-ce que ce premier coup dur nâest pas le dĂ©but dâune nouvelle Ăšre pour lâEpic ? LâarrivĂ©e du nouveau cinĂ©ma y est pour quelque chose ? Que va devenir la structure ? Sera-t-il remplacé ? Est-ce que les locaux vont souffrir du syndrome de la boĂźte vide ? », sâinterrogent plusieurs Thannois. Quoi quâil en soit, Olivier GarrabĂ© partira avec la force dâaller de lâavant et lâenvie de continuer Ă faire transpirer la culture sur scĂšne.
« Une situation économique trÚs délicate »
Le conseil de communautĂ©, sur proposition du prĂ©sident de la communautĂ© de communes de Thann-Cernay, François Horny, a dĂ©cidĂ© du non-renouvellement du contrat Ă durĂ©e dĂ©terminĂ©e du directeur des espaces culturels jeudi 28 janvier. DĂ©cision votĂ©e Ă 44 voix pour et deux abstentions. Le prĂ©sident a commandĂ©, en octobre 2020, un audit financier et organisationnel des espaces culturels Thann-Cernay afin de connaĂźtre la situation de cette structure frappĂ©e par la crise sanitaire. « Les conclusions de cet audit montrent un dĂ©ficit rĂ©el dâexploitation important, particuliĂšrement en 2019, ce qui place cette structure dans une situation Ă©conomique trĂšs dĂ©licate et impactera les finances de la communautĂ© de communes. Olivier GarrabĂ©, directeur, est lâordonnateur de la rĂ©gie et Ă ce titre, il prescrit lâexĂ©cution des recettes et dĂ©penses. Ă la vue de cette situation, il apparaĂźt que la maniĂšre de servir dâOlivier GarrabĂ© ne donne pas satisfaction », explique le prĂ©sident dans un communiquĂ©. « Le dĂ©ficit important rĂ©vĂ©lĂ© par lâaudit est liĂ© Ă la crise du Covid et Ă un dĂ©ficit structurel. En 2020, la comcom a rĂ©duit son budget de 34 000 euros pour lâEpic. Il y a aussi eu un dĂ©part coĂ»teux Ă la retraite validĂ© par les Ă©lus », conclut Olivier GarrabĂ©.